Mediapart, le journal en ligne, avait en septembre dernier diffusé un entretien avec François Maspéro : François Maspero: «Aller au-devant du monde»
Parmi les commentaires , je me permets de diffuser celui-ci qui exprime l'amour et le respect que sa personne suscitait.
"Elégance et pudeur
oeil perçant et regard doux
modestie et révolte
distance et chaleur
M.Maspero est un honnéte homme
de ceux qui donnent une épaisseur aux espoirs passés
et qui ne désespérent pas le futur .
Merci pour cet entretien sensible et profond."
Rue Saint Séverin dans le quartier latin, la librairie de Maspero : "La joie de lire" avec son nom qui collait parfaitement au propriétaire du lieu, a été le rendez-vous incontournable de notre génération. On s'y retrouvait dans une fraternité hors frontières. D'Europe, d'Asie, d'Afrique, des Amériques, nos échanges passionnés, certes, mais sans méchanceté. Cettte librairie était la nôtre parce que nous savions que le commerce n'était pas son principal but. Maspero n'éditiait pas et ne vendait pas des livres, à l'inverse de ceux qui l'ont succédé, pour faire gonfler son chiffre d'affaires. Il nous conviait à "aller au devant du monde."
Malheureusement, nombreux ont été ceux pour qui "voler chez Maspero n'était pas voler".
"
Mais dans toute entreprise indépendante, le patron est toujours seul face "aux angoisses de fin de mois", et Maspero seul "devant les tribunaux pour les condamnations quand je bravais les interdictions". On sent bien qu'il n'a jamais pu lever ces ambiguïtés-là.
"Ce projet avait un sens.... j'aurais dû accorder plus d'attention au titre du film qui m'attribuait cette phrase : "Les mots ont un sens". "Je doutais continuellement. J'avais tort." "Penser que le monde devait être transformé n'était pas une utopie, c'était du réalisme."
La fermeture de la librairie sonnait la fin d'une époque où l'enthousiasme, la joie, l'inventivité et ...la révolte animaient nos jeunes esprits qui révaient d'un monde sans grippe-sous et autres exploiteurs des corps et des âmes.
François Maspero nous a en quelque sorte "porté". Nous avons été ses enfants et son départ nous rend aussi triste qu' à la perte d'un parent aimé.
/https%3A%2F%2Fstatic.mediapart.fr%2Fetmagine%2Fdefault%2Ffiles%2Fmedia_275715%2Fmaspero__jean-luc_bertini01.jpg)
François Maspero, " La joie de lire "
A peine libéré de prison, au début de l'été 1962, je suis allé en vitesse, Rue St Séverin, à " La joie de lire ", la librairie Maspero. Il y avait du monde comme d'habitude, François M. é...
http://blogs.mediapart.fr/blog/claude-glayman/130415/francois-maspero-la-joie-de-lire
Et puis, voici que Eduardo Galeano, s'en va lui aussi .
Eduardo Galeano je l'ai découvert grâce à un ami brésilien. C'était un hiver à New York, nous nous trouvions dans une librairie.
Tu connais ? m'a t-il dit en me montrant la version anglaise des "Veines ouvertes de l'Amérique Latine. Cinq siècles de pillage d'un continent."
Non, je ne connaissais pas.
Pourtant le livre avait été publié en 1971. Et nous étions à la fin des années 1990.
Et ce livre parlait de tout ce qui concerne nous autres de l'Amérique du Sud et de la Caraïbe.
C'est un travail colossal de recollection de textes d'archives qui traversent tout le continent, et Haïti y ocupe une place importante, au cours des "cinq siècles de pillage."
Le Président Chavez, avait, on se le rappelle, offert ce livre à Obama dans le cadre du Sommet des Amériques à Trinidad.
Mais, bon sang, qu'est-ce qu'Obama aurait bien pû comprendre de cette histoire aussi éloignée de lui, de son itinéraire et de son idéologie qu'est Mars de la terre !
Sur ce blog, j'ai souvent publié les écrits de Galeano parce qu'il était un sincère ami du peuple haïtien dont il connaissait bien l'histoire et les déboires.
Sa voix va nous manquer, particulièrement au moment où s'évanouissent comme une peau de chagrin, celles des résistants, porteurs d'espoir, combattants contre l'indignité.
Eduardo Galeano n'avait pas droit aux honneurs de la presse dominante occidentale. De ce fait, les intellectuels haïtiens, à de rares exception près, l'ignoraient totalement. En véritable ami d'Haïti, il dérangeait.
"L'écrivain, né en 1940 à Montevideo, avait été emprisonné après le coup d’État militaire de 1973 dans son pays, avant de s'exiler en Argentine puis à Barcelone. Il était rentré en Uruguay après le rétablissement de la démocratie en 1985."
Sur ce blog nous avons souvent difffusé le travail de Galeano.
Et nous sommes profondément attristés par la mort d'un ami qui, avec constance, détermination et humour nous a accompagnés, soutenus, éclairés.
Ayibobo pour toi Eduardo !
Au nom des Haïtiens nous te disons : Honneur et respect !
Commenter cet article