C’est une question d’argent surtout
Malgré certaines dérives du pouvoir en place dénoncé pour son autoritarisme, malgré la crise politique et la montée de l’insécurité, des acteurs de l’international ne jurent que par l’organisation d’élections dans le pays en 2021. Ils soutiennent même un référendum pour changer la Constitution, ce qui est interdit par l’actuelle Loi mère du pays.
Dans un rapport de seize pages confié au Conseil de sécurité des Nations unies le 11 février 2021, le Bureau intégré des Nations unies en Haïti confirmait cet appui.
Comme l’ONU, l’ambassade des États-Unis en Haïti se montre en faveur des élections. L’ambassade n’a pas voulu faire de commentaires sur cette velléité, mais renvoie à un tweet du porte-parole du département d’État, Ned Price, en date du 2 mars 2021. « Il incombe au gouvernement d’Haïti d’organiser des élections en 2021 qui sont libres, justes et crédibles », affirmait-il.
Outre le « sauvetage » de la démocratie, l’international a aussi des intérêts économiques dans l’organisation des élections en Haïti, selon Gracien Jean. « Dans la démocratie, les élections sont un marché », rappelle le politologue qui souligne que cette communauté internationale a des experts à payer et des matériels à vendre pour l’organisation des joutes.
Les élections de 2021 coûteront 120 millions de dollars. L’Etat participera à hauteur de 40 millions, et l’international contribuera pour 80 millions. Ce coût exorbitant est le plus haut sommet d’une courbe qui a commencé depuis quelques années. En 1995, les élections avaient coûté 19 millions de dollars, et 34 millions en 2010. En 2016, le coût s’élevait à 60 millions.
Sauf à quelques rares occasions, comme en 2000 et 2016, c’est en majeure partie la communauté internationale qui finance les joutes électorales.
Intérêt économique
Dans les élections haïtiennes, le coût moyen par électeur est très élevé. En 2006, selon l’économiste Etzer Emile, ce montant était de 14 dollars américains alors qu’il était de 1,2 dollar au Chili, 1,8 dollar au Costa Rica, 2,3 dollars au Brésil et de 4 dollars en France.
Pour Etzer Emile, l’inexistence d’un système électoral dans le pays peut, en majeure partie, expliquer ce phénomène. « À chaque nouvelle élection, il faut repartir de zéro. Le pire est que l’on opte pour des solutions logistiques hors de prix pour mieux surfacturer », dénonce l’économiste.
Si la plupart des autorités haïtiennes sont corrompues, l’international a lui aussi ses intérêts dans les prix élevés du processus électoral. Etzer Emile rappelle qu’une institution comme le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui d’habitude gère les fonds électoraux en Haïti, a tout intérêt à voir grossir les chiffres.
Les frais de gestion de cette institution se situent entre 8 % à 14 % du montant à gérer. Donc quand le coût grimpe, le PNUD voit augmenter ses frais de gestion.
Pour le professeur Camille Chalmers, sociologue, ces sommes astronomiques sont un « avilissement » pour le système électoral haïtien. Il estime que ce « projet d’avilissement » a été porté par la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti, qui est responsable si aujourd’hui les Haïtiens n’ont aucune confiance dans le système électoral.
Aujourd’hui, les élections en Haïti ne sont pas une affaire de vision, de projets nationaux et de politiques publiques, mais une question de marchandage, regrette le professeur qui parle d’un « vaste marché d’achat et de vente de bulletins, de mandataires et de responsables de bureaux de vote ».
Camille Chalmers estime qu’il est nécessaire de repenser le système électoral haïtien afin de le libérer de l’emprise de l’argent.
SUITE dans le lien.
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La communauté internationale a des intérêts cachés dans les élections haitiennes
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