Par Robert Berrouët-Oriol
Publié à Port-au-Prince dans Le National du 12 octobre 2021
Ces derniers mois, la détérioration accélérée de la situation sécuritaire et politique en Haïti a mis en lumière le jeu macabre des contradictions et des intérêts communs de ses différents protagonistes, les acteurs nationaux et étrangers, ces derniers étant regroupés au sein d’une bienveillante et hyperactive coterie internationale dénommée « Core Group » (qui comprend les ambassadeurs d’Allemagne, du Brésil, du Canada, d’Espagne, des États-Unis d’Amérique, de France, de l’Union européenne, du Représentant spécial de l’Organisation des États Américains et de la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations Unies). À l’opposé des justes revendications de la population portées par la société civile, le cartel politico-mafieux connu sous le nom de PHTK (Parti haïtien tèt kaleouvertement néo-duvaliériste) cristallise et organise depuis dix ans, avec l’aval décomplexé du « Core Group », une gouvernance du pays caractérisée par la dilapidation des fonds publics et des fonds du programme PetroCaribe (3,8 milliards de dollars), le blanchiment d’argent à grande échelle, l’extinction programmée des droits citoyens, la décapitation des institutions de l’État, la violente répression des protestations citoyennes publiques par l’instrumentalisation des corps répressifs de la Police nationale, la tolération et/ou la complicité de l’Éxécutif dans les assassinats ciblés et les massacres dans les quartiers populaires, la banalisation de la corruption et du népotisme installés à tous les étages de l’édifice social. Comment le cartel politico-mafieux baptisé PHTK a-t-il pu, depuis une dizaine d’années, conserver le pouvoir exécutif en dépit de sa forte contestation par la société civile haïtienne ? Composé, entre autres, d’un nombre indéterminé de « grands mangeurs » –selon l’expression populaire dédiée à cette catégorie de politiciens de la petite et moyenne bourgeoisie–, parmi lesquels Michel Martelly, Laurent Lamothe, Jack Guy Lafontant, Evans Paul/KPlim, Jovenel Moïse, Ariel Henry, etc., le cartel politico-mafieux PHTK s’est métastasé et s’est maintenu au pouvoir parce qu’il a su protéger et assurer la continuité des « affaires » de l’oligarchie traditionnelle et tirer profit, en plus de la lucrative « rente financière d’État », des juteux bénéfices du trafic de drogue et des armes de guerre capitalisé à l’échelle nationale. Déjà florissant durant la dictature de Jean-Claude Duvalier, le trafic de drogue est devenu au fil des ans un marqueur social et économique majeur dans la gouvernance du pays, et il compte parmi ses relais d’importantes figures de l’oligarchie traditionnelle et des acteurs de premier plan de la criminalisation/gangstérisation du pouvoir d’État (voir l’article de Leslie Péan, « Des élections à saveur de cocaïne », AlterPresse, 27 janvier 2014).
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